Economie

Production et entreprises

20.02.24

Une industrie technique, innovante et sûre

La mise sur le marché et la diffusion d’un médicament suivent un processus réglementé, de la recherche fondamentale à la commercialisation.
La production industrielle joue un rôle essentiel dans la vie du médicament ; elle mobilise des compétences très diverses, allant du développement galénique à la maintenance industrielle.
Elle répond à des normes de qualité nationales et internationales très strictes, et garantit le respect de l’environnement et de la sécurité.
On dénombre deux classes de médicaments : les médicaments chimiques et les médicaments biologiques.
En 2022, 4 médicaments nouveaux sur 10 étaient des médicaments biologiques. Ce ratio est stable depuis plusieurs années.

 


L’industrie pharmaceutique opérant en France

La production pharmaceutique possède des atouts fondés sur un tissu industriel dense de plus de 271 sites dotés d’une forte expertise technologique et logistique.
L’ensemble des segments de marché sont couverts par l’outil de production français.
Avec l’émergence de nouvelles technologies, il est désormais possible d’envisager des approches disruptives qui permettront la production de thérapies innovantes à des coûts abordables et au plus près du malade.
La production des thérapies biologiques innovantes est donc un enjeu compétitif majeur, mais elle est également indispensable pour garantir un meilleur accès aux innovations de demain pour les patients, ainsi que notre indépendance sanitaire.
La France, malgré des équipes aux savoir-faire reconnus, est distancée par ses voisins européens. La valorisation des atouts français dans le domaine de la bioproduction appelle à la mise en place d’une politique coordonnée.
 

 

Dans ce contexte, l’association France BioLead a été créée en décembre 2022 pour promouvoir la production de biomédicaments en France.
Cette structure réunit tous les acteurs de la bioproduction française, incluant les industriels, la recherche académique, les organismes de formation, l’Etat, ainsi que les pôles de compétitivité, les clusters, les associations et les syndicats professionnels.
France BioLead a été inaugurée en présence de Roland Lescure, ministre délégué en charge de l’industrie, et bénéficie du soutien de François Braun, ancien ministre de la Santé et de la Prévention, ainsi que de Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Les 15 membres fondateurs, dont le Leem, ont également été présents lors du lancement. La mission de France BioLead consiste à structurer, piloter, accompagner, animer et promouvoir la filière française de bioproduction ainsi que ses acteurs.
Une dynamique d’investissements d’environ 1 milliard d’euros par an a été constatée au cours des trois dernières années sur les sites de production. Ces investissements sont principalement dirigés vers la bioproduction et l’expansion des capacités de production.
Cette tendance positive, bien qu’elle ne suffise pas à rétablir la position de la France parmi les principaux producteurs européens, démontre néanmoins que l’écosystème reste dynamique et tente de maintenir une certaine attractivité.

La production française dans la compétition internationale

Depuis 1994, la politique conventionnelle Etat-industrie pharmaceutique vise à faire de la France l’un des premiers producteurs européens et l’un des principaux exportateurs mondiaux de médicaments.
Pour renforcer le tissu industriel pharmaceutique en France, l’accord-cadre signé en mars 2021 entre le Leem et le Comité économique des produits de santé prévoit la prise en compte des investissements, notamment en matière de développement et de production, réalisés dans l’Union européenne dans la fixation et la régulation des conditions de prix des médicaments.
Ainsi, l’accord permet l’octroi d’une garantie de prix facial d’un médicament pour lequel l’industriel a réalisé des investissements dans les capacités de production, la R&D ou les solutions numériques au sein de l’Union européenne, notamment en France, y compris par l’intermédiaire d’un façonnier (article 27). Les entreprises pharmaceutiques peuvent également bénéficier d’avoirs sur remises au titre du guichet du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) (article 29).
En pratique, cette mesure peine à renforcer l’attractivité du territoire français dans la compétition mondiale.
L’accord-cadre signé entre le CEPS et le Leem inclut par ailleurs deux articles dédiés au soutien à l’exportation, afin de permettre une période de stabilité de prix pouvant atteindre quatre ans pour des médicaments produits en Europe dont la libération de lot se fait en France (art. 30) et de mettre en place un tarif forfaitaire de responsabilité ou TFR en alternative à une baisse de prix (art.31).
Au sein de l’Union européenne, la France est de plus en plus concurrencée par ses voisins dans le domaine de la production. A titre d’exemple, l’Italie est devenue un concurrent majeur. Elle a dépassé la France alors que son gouvernement mène, lui aussi, une politique de réduction des dépenses publiques de santé impactant à la baisse le prix des produits.
Le gouvernement italien a décidé de mettre en œuvre une vraie stratégie industrielle pour faire du pays un pôle pharmaceutique majeur, en optant pour des facilitations réglementaires et des incitations fiscales pour les activités de R&D.
Ainsi, d’après Farmindustria, représentant de l’industrie pharmaceutique en Italie, la hausse de la production s’est traduite par une multiplication des exportations par cinq en vingt ans.

 

Sur les 508 médicaments autorisés en Europe entre 2017 et 2022, seulement 48 produits sont fabriqués en France, contre 122 en Allemagne, 97 en Irlande, 74 aux Pays-Bas et 53 en Espagne.

 

 

La France affiche des résultats inférieurs à l’Allemagne et l’Irlande en ce qui concerne la mise en place de capacités de production de médicaments autorisés entre 2017 et 2022.
On constate que la France met surtout l’accent sur la production de médicaments princeps chimiques, soulevant ainsi des interrogations quant à sa souveraineté dans le domaine des innovations biotechnologiques.
Pour renforcer la compétitivité du secteur pharmaceutique français et réduire le risque de dépendance à d’autres pays, il est essentiel de diversifier la production en intégrant davantage de médicaments innovants et en adoptant de nouvelles technologies. Cette approche permettrait à la France d’améliorer sa position sur le marché international tout en favorisant une plus grande indépendance dans la production d’innovations issues des biotechnologies.
La production de médicaments génériques en France souffre d’un manque d’attractivité, comme le démontre l’Observatoire de l’accès aux médicaments publié par le Leem en 2022. La pression exercée sur les prix des génériques met en péril leur modèle économique, d’autant plus que les pays émergents constituent une concurrence féroce dans la production de génériques.

 

Investir pour moderniser


La France est l’un des premiers producteurs pharmaceutiques en Europe, mais son parc industriel est vieillissant et les investissements moins productifs.
En 2022, le Leem a commandé une étude au cabinet PwC Strategy& pour analyser les leviers de modernisation et de compétitivité de l’outil industriel pharmaceutique français. L’état des lieux indique que l’automatisation des opérations est le levier de modernisation aujourd’hui privilégié par les industriels.
Le traitement des données complexes et la mise en continu des procédés sont moins développés et représentent les domaines potentiels d’investissement pour améliorer la performance industrielle des acteurs du secteur.
Après identification et priorisation des besoins, l’analyse a permis d’identifier et de sélectionner plusieurs solutions pour répondre aux besoins de modernisation des sites industriels.
Une fiche de synthèse a été réalisée pour neuf d’entre elles afin que les industriels identifient facilement celles qui sont les plus adaptées à leurs besoins (ont été écartées toutes les solutions ayant un retour sur investissement supérieur à trois ans ou nécessitant une revalidation des procédés). La pertinence d’implémentation de chaque solution dépend de la maturité des sites industriels et de leur capacité de financement.
« L’objectif du catalogue des solutions est d’aider les industriels à comprendre chaque aspect de ces solutions, notamment leurs avantages et leurs caractéristiques de mise en œuvre. Cela permettra l’accélération du processus de prise de décision, et donc de modernisation », précise l’étude.
Au-delà des solutions proposées, cette étude a permis d’identifier quatre priorités afin d’améliorer la compétitivité et d’accompagner la modernisation du parc industriel :
Données industrielles : une stratégie de gestion et d’exploitation avancée des données peut accroître la productivité et améliorer la qualité.
Cybersécurité industrielle : les approches de traitement de la cybersécurité industrielle doivent être menées conjointement au déploiement de solutions digitales.
Compétences : la mise en place de certaines des solutions nécessitent le recours à des compétences métier et data.
Développement durable : sous la pression réglementaire et sociétale, il est un enjeu essentiel pour l’industrie pharmaceutique.

La place de la France dans les médicaments de thérapie innovante (MTI)

En novembre 2019, le Leem a publié une étude réalisée par MabDesign sur les MTI présentant un état des lieux de cette filière en France. Cette dernière est dynamique et bien implantée sur le territoire. On comptait 36 sociétés pour 84 produits répartis dans 100 programmes de recherche en 2019. 71 produits sont au stade de recherche (R&D ou pré-clinique), et 29 sont en études cliniques (phases I à III).

 

Une industrie peu concentrée

Bien que l’industrie pharmaceutique soit marquée par une dynamique de rapprochement, elle demeure peu concentrée, tant en France qu’au niveau mondial, du fait de la grande variété des produits, des techniques et des marchés.
En France, la première entreprise pharmaceutique atteint à peine plus de 6,5 % de part de marché, et les cinq premières ne comptabilisent que 27 % de part de marché.
Le nombre d’entreprise a décru de près d’un tiers en quarante ans et de près de 20% au cours des vingt dernières années.
Cela s’explique majoritairement par les fusions-acquisitions.
 

 

Une envolée du prix de la matière première

La crise sanitaire de la Covid-19 et, plus récemment, le conflit russo-ukrainien ont fortement amplifié la tendance inflationniste qui préexistait, notamment dans les approvisionnements industriels.
Cet accroissement des coûts est attribuable à deux facteurs. Le premier est directement lié aux difficultés d’approvisionnement en matières premières, qu’il s’agisse de minerais tels que l’aluminium ou de dérivés du pétrole comme certains solvants et le PVC.
La seconde raison, indirecte, est due à l’augmentation du coût de l’énergie, ce qui entraîne une forte incidence sur les coûts de transformation des matières premières en produits intermédiaires ou finis, notamment dans le cas du papier et du carton.
L’augmentation quasi-constante du coût des matières premières questionne la soutenabilité économique pour les industriels pharmaceutiques, qui n’ont pas la possibilité de répercuter ces hausses sur le prix des médicaments, celui-ci étant administré.
A l’inflation des matières premières s’ajoute l’élévation du coût des énergies, dont l’indice de prix à la consommation a augmenté de près de 60 % entre 2016 et 2022.

 

 

 

 

L’essentiel

6ème

Place de la production pharmaceutique française en Europe en 2021.

23,6 milliards d'euros

Montant de la production pharmaceutique française en 2021.