Innovation & Santé

Vers un nouveau système de santé

25.04.19
Une nouvelle articulation entre médecine de ville, secteur médico-social, hôpital et la transformation des métiers.

L'avenir de notre système de santé vu par le Haut Conseil pour l'avenir de l'Assurance maladie

Le rapport du HCAAM, "Contribution à la transformation du système de santé", de mai 2018, expose la vision du Haut Conseil sur les évolutions à apporter au système de santé.


Ce dernier distingue trois scénarios possibles d'évolution de notre système de santé, dont voici les points majeurs :

1. Le premier scénario, "au fil de l'eau", décrit le prolongement de la situation actuelle dans laquelle in fine "les inégalités s'accroissent aussi bien dans leur dimension sociale que territoriale".
Dans ce scénario redouté, la faible attractivité de l'exercice ambulatoire pousse les professionnels vers les centres hospitaliers les plus importants. La poursuite du mouvement de spécialisation génère des phénomènes de pénurie de l'offre susceptible de répondre aux besoins d'une population vieillissante.


2.  Le second scénario est celui de la "concentration menée à son terme".
Dans ce cas de figure, le mouvement de restructuration engagé dans le champ de l'hospitalisation privée puis publique va à son terme avec la constitution de pôles regroupant les soins spécialisés et les équipements lourds, notamment dans le cadre des Groupements hospitaliers de territoire (GHT).
Ces établissements attirent les professionnels, qu'ils soient spécialistes ou généralistes, ainsi que des professions paramédicales.
L'offre de soins spécialisés de ville se polarise autour des établissements et se concentre dans des zones urbaines.
Le défaut d'expertise transversale dans un système spécialisé rend difficile la réponse aux besoins des patients polypathologiques (notamment les patients âgés).
L'offre de soins primaires se trouve déstabilisée dans sa capacité à répondre aux besoins de la proximité, faute d'expertise spécialisée facilement mobilisable et de lits de médecine ou de soins de suite et de réadaptation (SSR) en proximité.
 

3. Le troisième scénario qu'appelle de ses vœux le HCAAM est celui dit de la "différenciation" et marque une rupture avec l'hospitalocentrisme.
Cette trajectoire est appuyée par le couplage entre les progrès scientifiques et techniques et les évolutions des besoins de santé, notamment le développement des pathologies chroniques.
Le HCAAM constate en effet qu'une diversité d'organisations se constitue. Elles doivent prendre place aussi bien en hospitalisation qu'en ambulatoire en tirant parti des possibilités ouvertes par les évolutions de la science, des techniques (hospitalisation à domicile, e-santé...) et en intégrant le développement des pathologies chroniques (et la chronicisation des pathologies).
Dans ce scénario, les établissements hospitaliers cessent d'être le centre de gravité du système. Ils sont ouverts sur un extérieur qui s'est structuré et n'est plus conçu comme un avant ou un après, "amont/aval" de séquences hospitalières.
C'est, en effet, essentiellement hors de ces séquences que s'observent et doivent se traiter les pathologies chroniques et celles du vieillissement.

 

Question clé 1 : Expérimentation, intégration, agilité : comprendre au plus tôt les conséquences organisationnelles des innovations médicales pour en tirer parti

En 2018, la collaboration entre professionnels et établissements de santé reste limitée. Les acteurs de la santé font ce que le système demande, évalue et rémunère : des actes de soins performants, de qualité, mais de manière isolée.

Objectif principal des nouveaux métiers et du modèle de collaboration, le parcours de soins ou de santé du patient deviendra progressivement l'unité d'œuvre principale du système de santé en lieu et place de l'acte de soin.
Les relations gagneront en transparence et en confiance entre acteurs de la ville et de l'hôpital. Les services et spécialités mobilisés autour d'un patient polypathologique interviendront de manière cohérente et pertinente.
La protocolisation de ces parcours se mettra en place pour les soins et l'accompagnement apportés au patient malade, puis pour la prévention et la vie en bonne santé.
La délégation encadrée de tâches entre professionnels de santé sera la norme.
La démographie médicale induira une rareté conjoncturelle du temps médical (au moins pour les dix prochaines années, avant que les mesures en cours produisent leurs effets), qui forcera probablement le mouvement.

 

Question clé 2 : La transformation des métiers de santé au regard des nouvelles organisations et des innovations

La perspective, dans la logique de sortie de l'hospitalocentrisme et du médicocentrisme, est d'organiser toujours davantage de partage d'informations et de délégations de tâches.
Aux côtés du patient, acteur de sa santé, le médecin, l'infirmier, le pharmacien, n'auront plus les mêmes métiers, ni les mêmes frontières entre leurs activités.
Les vagues d'innovations thérapeutiques peuvent provoquer un tsunami des métiers de santé. Il en va du médecin comme de tous les autres professionnels de santé.
Grâce, notamment, à l'abondance des données, les professionnels paramédicaux pourront encore davantage intervenir sur un certain nombre d'actes thérapeutiques, car nombre d'informations, d'observations et de décisions, intégrées dans les systèmes d'information, auront été validées scientifiquement.

 

La révolution du métier de médecin généraliste

Des maladies détectées plus tôt et des instruments extrêmement efficaces pour les traiter, tout ceci conduit à revisiter le rôle du médecin, au moins une partie de son rôle, vers un service pré et post-thérapeutique, plus appuyé sur les données, plus personnalisé.
Grande rupture conceptuelle de la médecine : elle n'est plus seulement curative, elle est également réparatrice, capable bel et bien d'améliorer le potentiel de l'être humain.
Le rôle de la médecine, appuyé sur les nouvelles possibilités médicamenteuses et chirurgicales, sera essentiellement de réparer, après avoir administré les traitements.
De plus en plus, on en viendra à réparer l'anomalie causale qui a généré le problème, la tumeur, par exemple, à réparer l'organe qui a été lésé par un infarctus ou une embolie.
On assiste à un déplacement radical de l'exercice médical vers ce que l'on pourrait appeler la "maintenance thérapeutique".

L'avenir s'oriente clairement vers le développement de la médecine personnalisée.

 

Question clé 3 : De professions cloisonnées à des tâches déléguées et de nouveaux métiers

L'infirmier sera probablement le grand bénéficiaire de ces mouvements.
Devenant, en quelque sorte, assistants de santé, pleinement acteurs de santé, les infirmiers ne seront plus là uniquement pour procurer des soins selon des prescriptions. Ils assureront considérablement plus, comme des suivis de consultations, en cancérologie ou en transplantologie.

La pharmacie elle aussi va muter. Elle passe, traditionnellement, par l'officine.
Il s'agissait, à l'origine, du site de fabrication individualisée du médicament. Il s'agit, aujourd'hui, de l'espace de distribution de médicaments industriels standardisés.
Il s'agira aussi, demain, d'un service connecté, humain et de proximité, pour le suivi des parcours personnalisés de santé.

 

Question clé 4 : Les patients demain : de l'association à la prise de pouvoir ?

Les patients interagissent entre eux et ont accès à une certaine forme de connaissance des maladies.
La société a de plus intégré l'idée de transparence et la reconnaissance du fait que le patient est un acteur de sa santé.

Dans les domaines sanitaire et médical, l'aspiration à la transparence et à la connaissance est une donnée à prendre en compte à la fois pour essayer d'impliquer encore davantage les patients dans les décisions, les programmes et les procédures les concernant directement, mais aussi pour être capable de mieux leur donner les clés de compréhension du système de santé.
Tout le secteur médical a désormais une obligation de pédagogie et de transparence à leur égard.
Cette irruption et cette affirmation du patient passent, entre autres, par les associations de patients. Celles-ci seront de plus en plus présentes dans le système de santé pour représenter les patients

 

 

 

(Dynamique 5 : Une nouvelle articulation entre médecine de ville, secteur médico-social, hôpital et la transformation des métiers).

Extrait de Santé 2030 - Partie 1 : les dynamiques à l'oeuvre - Retrouvez  l'intégralité de l'étude sur le site.