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Relancer la politique du médicament : interview de Philippe Lamoureux dans l’Espace Social Européen

26.10.23
Philippe Lamoureux, directeur général du Leem a accordé un entretien à l’Espace Social Européen dans l’édition du 20 octobre au 02 novembre.

Lors de cet entretien, il est revenu sur plusieurs sujets : Relations avec les pouvoirs publics, défis et compétitivité des acteurs, accès aux thérapies innovantes, PLFSS, CSIS… Il partage sa vision afin de mieux comprendre pourquoi la politique française du médicament semble à l'arrêt face aux concurrents européens et mondiaux. 

 

« Notre principal défi porte sur notre capacité à attirer la recherche et la production »

PLFSS

« Nous avions eu une très mauvaise surprise l’an dernier avec la LFSS 2023 – un texte considéré comme inacceptable par l’ensemble du secteur, avec une croissance et des mesures complètement en décalage avec les réalités du marché. Nous avions alors vivement réagi en indiquant aux pouvoirs publics que cette LFSS aurait de graves conséquences sur l’accès aux médicaments, notamment les plus innovants. Nous avions dans la foulée pris l’initiative de créer un observatoire du médicament. Celui-ci dont les conclusions ont été rendues publiques en juin dernier a établi la matérialité de ce que nous avancions. La mission diligentée par la Première ministre a depuis, validé nos analyses quant aux difficultés croissantes d’accès aux produits, matures comme innovants. Cette « prise de conscience » a débouché sur un projet de loi qui restaure les conditions du dialogue et qui tire les enseignements des erreurs de l’année passée. »

CSIS

« Les engagements du CSIS ont parfois eu du mal à trouver leur traduction dans le PLFSS, quand celui-ci ne les défaisait pas littéralement. C’est ainsi que nous avions des printemps qui chantaient – avec les CSIS – et des automnes qui déchantaient – avec les PLFSS. »

Relation avec les pouvoirs publics

« Nous sommes dans une configuration où les ministres de la Santé et de l’Industrie semblent travailler plus en écoute. Une méthode plus ouverte et une meilleure coordination [..] le temps n’est peut-être plus à la polémique mais à tenter de bâtir ensemble un « new deal ». »

Défis et compétitivité des acteurs

« Les Etats-Unis pèsent à eux seuls, près de la moitié du marché en termes de chiffre d’affaires et où les pays émergents tirent la croissance du secteur. Au milieu, l’Europe a pris l’option de politiques de régulation strictes, la France en particulier. »

« Il y a 15 ans, la France représentait 5% du marché mondial. Aujourd’hui nous nous situons sous la barre des 3%. Compte tenu de cette « part de marché » déclinante, notre pays tend à ne plus être un point de passage obligé pour les industriels. Il nous faut donc renouer rapidement avec les politiques d’attractivité, sous peine de voir les entreprises se détourner durablement de la France »

« Nous avons incontestablement besoin de plus d’Europe… Même si, il faut avoir conscience que nous avons tout à la fois des intérêts sanitaires communs et, dans le même temps, des intérêts économiques souvent divergents. Prenons l’exemple des ruptures d’approvisionnement, qui constituent un problème commun aux différents pays de l’UE : c’est au niveau communautaire que devraient être déterminée la liste des médicaments essentiels, la définition des plans de gestion des pénuries, les conditions de stockage, les e-notices et même la politique de relocalisation industrielle… Pris individuellement, chaque Etat membre n’a pas une taille critique suffisante pour peser sur le marché mondial. En revanche, si l’on raisonne à la dimension continentale, la donne sera différente »

Accès aux thérapies innovantes

« Ma conviction, c’est que l’arrivée massive d’innovations de rupture dans les prochaines années va faire exploser les cadres traditionnels et que nous devrons travailler de façon plus fine et souple. Cela appellera à diversifier davantage les mécanismes conventionnels et les modes de régulation des politiques du médicament pour les rendre à la fois plus intelligents et plus intelligibles. Une révolution culturelle en somme ! »

Pour conclure cette interview il est revenu sur ses moments marquants au sein du Leem

« J’aurai tendance à vous répondre qu’il n’y a eu que des temps forts. Mais s’il faut choisir, je citerais pêle-mêle, les assises nationales du médicament en 2011 peu de temps après mon arrivée du fait de l’ambition qu’ils auront su porter. Enfin, comment ne pas revenir sur l’épisode de crise sanitaire du Covid où le Leem a su démontrer sa capacité à mobiliser les acteurs de l’industrie, aux côtés des pouvoirs publics, quand l’urgence de la situation l’exigeait. »

 

pastille CFC