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Relations avec les Professionnels de santé et les acteurs de santé

07.06.21
Les relations entre les acteurs de santé, les experts et les industriels sont non seulement légitimes mais également nécessaires.
En effet, l’activité de recherche en santé implique des interactions nombreuses et de nature variée entre les industriels du médicament et les professionnels de santé, et plus particulièrement les experts.
La notion même d’expertise recouvre différentes réalités.
Il peut par exemple s’agir de l’expertise apportée par un professionnel à une entreprise du médicament dans le cadre de la réalisation d’essais cliniques. Cela peut également concerner l’expertise apportée par un professionnel de santé dans le cadre de la prise de décision publique en matière sanitaire (par exemples, experts auprès de la Haute Autorité de santé).

Indispensables aux progrès de la recherche, ces relations de travail se doivent d’être transparentes vis-à-vis du public dans une préoccupation de prévention des conflits d’intérêts.
Elles sont également, dans le même esprit, contrôlées par les instances ordinales, ce qui assure leur conformité à la loi.
La France connaît en effet depuis 1993 un encadrement fort des relations entre les entreprises du médicament et les professionnels de santé, complété en 2011 par un dispositif de transparence des liens d’intérêts.
Ce cadre légal et réglementaire a été considérablement renforcé par la loi « Santé » du 26 janvier 2016 et la loi « Ma santé 2022 » du 24 juillet 2019, et leurs textes d’application.

1/ La Transparence

•    La Transparence des liens des industriels (article L.1453-1 du CSP)

La loi sur la sécurité sanitaire du médicament du 29 décembre 2011 a introduit une obligation nouvelle pour les entreprises de publier leurs liens avec les différents acteurs de santé avec lesquelles elles travaillent.
L’objectif de ce dispositif est de faciliter la prévention et la gestion des conflits d’intérêts et également d’informer le public sur les relations entre les entreprises et ces acteurs.

Selon l’étude d’impact de la loi « Le public pourra disposer, des liens d’intérêt financiers ou en nature existants entre les entreprises visées par le présent projet de loi ainsi que les parties prenantes au monde de la santé concernées, et avoir ainsi un regard critique sur l’information en santé donnée ».
Le dispositif de publication des liens a progressivement été mis en place au cours des années qui ont suivi l’adoption de la loi.

L’adoption d’un décret du 21 mai 2013 a fixé la nature des informations à publier par les entreprises, et la première campagne de publication a eu lieu à l’automne 2013 : les informations étaient alors publiées sur les sites des entreprises.

Afin d’améliorer la transparence, les pouvoirs publics ont très rapidement décidé de mettre en place un site public unique centralisant l’ensemble des informations émanant des entreprises.
Ce site a été ouvert dans le courant de l’année 2014.
Pour y accéder, cliquez sur l'image ci-dessous.

 

Base Transparence

 

La loi de modernisation de notre système de santé ou loi « Santé » du 26 janvier 2016 a modifié le dispositif de publication, en ajoutant des catégories d’informations qui n’étaient pas prévues initialement, dont le montant des rémunérations versées aux acteurs concernés.

En effet, le texte de 2011 ne prévoyait que la publication du montant des avantages et le législateur a estimé qu’il était nécessaire que l’ensemble des montants financiers soit publié.
La loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé ou loi « Ma santé 2022 » du 24 juillet 2019 a par ailleurs ajouté les influenceurs à la liste des bénéficiaires de conventions que les laboratoires sont tenus de rendre publics.

Le dispositif de publication repose désormais sur les modalités suivantes :

Les entreprises concernées par l’obligation de publication

Le dispositif est applicable à l’ensemble des entreprises qui produisent ou commercialisent des produits de santé.
Sont ainsi concernés non seulement les laboratoires pharmaceutiques, mais aussi les entreprises de cosmétiques ou celles commercialisant des médicaments vétérinaires, pour qui les modalités de publication sont un peu différentes.
Doivent également publier leurs liens, les entreprises qui assurent des prestations associées aux produits de santé, comme par exemple les agences de communication en santé.


Les acteurs bénéficiaires des opérations

La loi a été au-delà de la publication des liens avec les professionnels de santé pour inclure dans le dispositif l’ensemble des acteurs de santé travaillant avec les entreprises :
-    Les professionnels de santé et leurs associations ;
-    Les étudiants se destinant aux professions de santé et leurs associations ;
-    Les associations d’usagers du système de santé (notamment associations de patients) ;
-    Les établissements de santé ;
-    Les académies, les fondations, les sociétés savantes et les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans le secteur des produits ou prestations de santé ;
-    Les personnes morales éditrices de presse, de services de radio ou de télévision et de services de communication au public en ligne ;
-    Les influenceurs qui, dans les médias ou sur les réseaux sociaux, présentent un ou plusieurs produits de santé ;
-    Les éditeurs de logiciels d'aide à la prescription et à la délivrance ;
-    Les personnes morales assurant la formation initiale ou continue des professionnels de santé ou participant à cette formation.


Les informations publiées

3 catégories d’informations doivent être publiées :
•    Les informations relatives aux avantages (repas, hospitalités, dons à des associations etc.) : leur date, nature et montant financier (à partir de 10 euros) ;
•    Les informations relatives aux conventions : l’objet de la convention, sa date, les rémunérations versées dans le cadre de ces conventions à partir de 10 euros et les avantages versés dans ce cadre, le bénéficiaire direct et le bénéficiaire final des sommes versées dans le cadre de la convention ;
•    Les informations relatives aux montants des conventions (le cumul des rémunérations et des avantages).


Les mises à jour semestrielles

Les informations sont mises à jour tous les semestres par les entreprises.
Elles sont publiées sur le site public unique, au 1er octobre pour les informations relatives au 1er semestre de l’année en cours, et au 1er avril pour les informations relatives au 2nd semestre de l’année précédente.

Opérationnel depuis 2014, le site public unique regroupe donc un très grand nombre d’informations, mais reste peu lisible pour le grand public.

Dans le prolongement de la mission relative à « l’amélioration de l’information des usagers et des professionnels de santé sur le médicament » faisant le constat de cette faible lisibilité, un chantier de refonte de cette base a été lancé par le Ministère de la Santé qui vise à la fois à simplifier le fonctionnement du site public unique, mais également à en améliorer la lisibilité.

A noter également, au plan européen, que les entreprises appliquent un code professionnel, le « Disclosure code » mis en place par la Fédération professionnelle européenne de l’industrie pharmaceutique l’EFPIA et qui assure dans tous les Etats membres de l’UE une publication des liens des industriels avec les professionnels de santé, les hôpitaux et les associations, sous des formes un peu différentes de celles mises en place en France.

Ainsi la transparence des liens est également étendue à toutes les entreprises pharmaceutiques établies dans l’UE par ce code professionnel.

•    La transparence des liens des agents publics et des experts : les déclarations publiques d’intérêt (article L.1451-1 à L.1451-3 du CSP)

Depuis la loi du 29 décembre 2011, l’ensemble des acteurs dans le champ de la santé publique et de la sécurité sanitaire (en pratique ceux qui collaborent aux travaux des agences) ont l’obligation d’effectuer des déclarations publiques d’intérêts (DPI).

Loi « Santé » de 2016 a par la suite remanié les modalités de ces DPI dans le sens d’une extension des obligations des agents publics et des experts et des informations publiées.
Ces personnes doivent remettre à l’autorité dont ils dépendent ou avec laquelle ils travaillent, des DPI qui précisent les activités (rémunérées ou non) réalisées avec des entreprises commercialisant des produits de santé ainsi que les montants éventuellement perçus.

Depuis le 1er juillet 2017, ces DPI sont publiées sur le site unique « DPI » centralisant l’ensemble des informations émanant des agents publics et des experts.
Pour y accéder, cliquez sur l'image ci-dessous.
 

DPI


Les déclarations antérieures au 1er juillet 2017 et de moins de cinq ans d’ancienneté qui n’ont pas encore été transférées sur le site unique sont consultables sur les sites des autorités ou des agences concernées (ANSM, HAS, CEPS, etc.).
 

2/ L’encadrement des avantages consentis aux professionnels de santé

Adopté en 1993 à l’occasion de la loi « DMOS », ce dispositif de contrôle a fait l’objet de plusieurs modifications successives depuis cette date, dont la plus importante est issue de la loi « Santé » du 26 janvier 2016.

Depuis l’origine, ces dispositions posent :
            -  Pour les entreprises, un principe d’interdiction de consentir des avantages illégaux ;
            -  Pour les professionnels de santé, un principe d’interdiction de recevoir de tels avantages.

Ces interdictions sont sanctionnées pénalement.

Par ailleurs, le texte soumet l’ensemble des opérations (recherches, participations à des manifestations professionnelles et scientifiques, autres prestations de services) mises en place avec les laboratoires pharmaceutique à un contrôle préalable des ordres professionnels concernés.

Les instances ordinales ont donc ainsi une visibilité complète sur toutes les opérations avant qu’elles ne soient mise en œuvre, ce qui leur permet de vérifier qu’elles sont conformes à la loi :

            -  Les activités de recherche et d’évaluation sont contrôlées non seulement sur la réalité et le sérieux des opérations mises en place, mais également sur la proportionnalité de la rémunération consenties avec la charge de travail ;
            -  Les invitations sont strictement limitées à des manifestations professionnelles et scientifiques dont le sérieux est également vérifié et sous réserve que l’hospitalité prise en charge soit d'un niveau raisonnable et limitée à l'objectif professionnel et scientifique principal de la manifestation et n'est pas étendue à des personnes autres que les professionnels directement concernés.

            -  Les autres opérations (par exemple contrats avec les orateurs dans les congrès, participation à des boards scientifiques) sont contrôlées par les instances ordinales sur leur objet et la proportionnalité des rémunérations versées.

Jusqu’à l’entrée en vigueur du nouveau dispositif, les ordres professionnels rendaient un avis sur ces opérations.

Les entreprises n’avaient pas l’obligation d’arrêter une opération en cas d’avis négatif (même si en pratique les avis négatifs étaient en grande majorité respectés par les entreprises).
Dans un tel cas, elles devaient cependant en informer les professionnels de santé afin qu’ils puissent le cas échéant se retirer d’une opération.

Depuis l’origine, ce dispositif posait de fortes difficultés d’interprétation et de mise en œuvre. C’est la raison pour laquelle une réforme en profondeur a été introduite par la loi « Santé » de 2016, dans un objectif de clarification mais également de renforcer le contrôle des opérations.

Le nouveau dispositif « Encadrement des avantages », codifié aux articles L.1453-3 et suivants du code de la santé publique, est entré en vigueur depuis le 1er octobre 2020.
Plusieurs textes d’application en ont précisé les modalités d’application.

Le nouveau dispositif apporte des précisions sur la nature des opérations interdites, des opérations autorisées qui ne sont pas considérées comme des avantages (comme par exemple les contrats de travail des professionnels de santé salariés dans des entreprises) et des opérations qui peuvent faire l’objet de dérogations (les contrats de prestations de services, les dons ou subventions destinés à encourager la recherche ou à des associations, les hospitalités ou le financement de la formation continue).

Il met également en place un nouveau régime de contrôle : désormais, toutes les opérations qui dépassent des seuils financiers fixés par arrêté doivent être autorisés par les Ordres professionnels ou par les agences régionales de santé compétents, au lieu de la demande d’avis qui existait jusqu’à présent.
Les opérations dont les montants sont inférieurs ou égaux à ces seuils doivent, quant à elles, être déclarées aux Ordres ou ARS avant leur mise en œuvre.
Autrement dit, la décision des Ordres professionnels ou des ARS s’impose désormais aux entreprises qui doivent annuler les opérations ayant fait l’objet d’un refus d’autorisation.

Désormais, les déclarations ou demandes d’autorisation sont effectuées sur la plateforme « IDAHE 2 » pour les médecins inscrits à l’Ordre, et sur la plateforme « Ethique des professionnels de santé (ou « EPS ») pour les professionnels de santé relevant des autres ordres, et pour les personnes morales soumises à ce nouveau dispositif, dont les associations qui regroupent des professionnels de santé font parties.

Si l’objectif initial de ce nouveau dispositif était de clarifier et sécuriser les conditions dans lesquelles les entreprises et les professionnels de santé travaillent ensemble, force est de constater qu’il s’avère complexe dans sa mise en œuvre et soulève encore de nombreuses questions d’interprétation.

L’ensemble des acteurs sont mobilisés dans l’objectif de parvenir à une lecture partagée par tous.
Le Leem met à disposition des professionnels de santé, étudiants et associations une brochure qui vise à apporter des réponses aux principales questions qu’ils sont susceptibles de se poser.

 

La brochure

 

 

L'infographie