Consommation : répartition et financement
La consommation de soins et de biens médicaux est encadrée par des actions de maîtrise médicalisée
Les comptes nationaux de la santé mesurent chaque année les différents postes de la consommation médicale totale (valeur totale des biens et services médicaux consommés) et de la dépense courante en santé (somme des dépenses engagées par les financeurs publics et privés pour la fonction santé).
En 2020, la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM), en France, a atteint 209,2 milliards d’euros, soit 3 109 euros par habitant. Elle a progressé de 0,4 %, après une augmentation de 2,0 % en 2019.
Rapportée à la population, la consommation de médicaments et autres produits pharmaceutiques a été, en moyenne, de 447 euros par habitant en 2020. Ce chiffre recouvre une très grande diversité, puisque ce sont surtout les personnes âgées et celles atteintes de maladies graves qui consomment le plus.
Pour la première fois, les remises conventionnelles étaient intégrées au sein de la CSBM, entraînant une moindre dépense de 4,0 milliards d’euros en 2020.
Le périmètre des dépenses présentées cette année dans le bilan économique n’est donc pas strictement comparable à celui des précédentes éditions.
La consommation française est liée à sa structure : d’un côté, un faible recours à la chirurgie ambulatoire et aux formes modernes d’hospitalisation, relativement économiques, par rapport aux pays voisins ; de l’autre côté, un manque de sensibilisation des acteurs (patients et professionnels de santé) au coût des actes et des produits de santé (exonération du ticket modérateur et tiers payant, faiblesse des contrôles et absence de traçabilité informatique des prescriptions hospitalières).
Toutefois, les pouvoirs publics s’efforcent de contrôler cette consommation en faisant évoluer le comportement des acteurs de santé via des actions de maîtrise médicalisée.
Depuis avril 2009, les médecins libéraux peuvent s’engager sur des objectifs de santé publique, portant notamment sur des prescriptions de produits anciens moins chers — dans le répertoire ou non —, et percevoir une rémunération sur objectif de santé publique (ROSP), de 4 891 euros en moyenne en 2021, en complément de leur rémunération à l’acte.
L’industrie pharmaceutique se mobilise également, notamment via le Collectif bon usage du médicament, réunissant tous les acteurs impliqués. Ces efforts ont abouti à la mise en œuvre, en 2016, d’un programme d’actions ciblées sur les personnes âgées qui prévoyait :
• une campagne de sensibilisation auprès du grand public ;
• des outils d’aide à la prescription et à la dispensation, disponibles sur un site internet dédié aux professionnels de santé, reflexeiatrogenie.com ;
• la formation des équipes de pharmaciens d’officine grâce à un module d’e-learning ;
• des fonctionnalités nouvelles dans les logiciels d’aide à la prescription, permettant aux médecins de mieux détecter les interactions médicamenteuses ;
• des réunions de collaboration organisées entre professionnels de santé (pharmaciens et médecins généralistes).
Toutes ces actions ont été évaluées. Elles ont contribué à réduire la consommation médicamenteuse chez les personnes âgées de plus de 65 ans, mais aussi le nombre d’interactions médicamenteuses, et généré 185 millions d’euros d’économies entre 2015 et 2016.
Ces résultats encourageants ont incité les membres du Collectif du bon usage du médicament à poursuivre leur travail. Ils se réunissent désormais lors du Forum du bon usage du médicament.
En parallèle, la Convention pharmaceutique de 2012 a incité à la délivrance de génériques par le pharmacien (tiers payant conditionné par l’acceptation de la substitution), ce qui a fortement contribué à l’augmentation de part de marché des génériques.
La consommation de médicaments augmente moins vite que celle des autres biens courants
Le tableau 75 montre que la part de la consommation médicale dans le PIB a progressivement augmenté, passant de 5,1 % en 1970 à 9,1 % en 2020. Tandis que la part de la consommation de médicaments est restée stable : 1,3 % en 1970 et en 2020.
Cette augmentation, jointe au ralentissement de la croissance économique depuis 1975 et à l’amélioration de la prise en charge collective des soins, a entraîné une situation de déficit chronique de l’Assurance maladie.
Lorsqu’on observe l’évolution de la consommation de médicaments entre 2008 et 2019, celle-ci est restée plutôt stable au regard d’autres postes de consommation des ménages, tels que l’alimentation, le logement ou encore le tabac.
La politique de baisses de prix appliquée sur le médicament depuis plusieurs années explique en partie cette tendance.
La baisse significative pour le médicament en 2020 s’explique par la nouvelle méthodologie employée par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) pour comptabiliser les remises conventionnelles.
Dans la structure de la consommation de soins et de biens médicaux, le médicament compte pour 14,4 % en 2020, soit un niveau inférieur à celui qu’il avait en 1980.
Les dépenses de soins et de biens médicaux sont financées par la Sécurité sociale à plus de 80% en 2020
La Sécurité sociale reste de loin le premier financeur des dépenses de santé, avec 79,8 % du financement. Les complémentaires (mutuelles, sociétés d’assurances, institutions de prévoyance) assurent 12,3 % du financement des dépenses de santé, dont 5,9 % pour les mutuelles et 4,2 % pour les assureurs. La part directe des ménages représente actuellement 6,5 %.
Dans le contexte de crise sanitaire, les prestations versées par les organismes de complémentaire santé (OC) ont baissé de 2,2 milliards d’euros en 2020 par rapport à 2019. Dans le cadre de la loi sur le financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2021, une contribution exceptionnelle des OC pour la prise en charge des dépenses liées à la gestion de l’épidémie de Covid-19 a été mise en place. Elle vise à financer l’Assurance maladie, en prenant en compte les moindres dépenses des OC constatées pendant la crise sanitaire.
Comparaisons internationales de la consommation de médicaments
La France a longtemps été présentée comme le premier pays consommateur de médicaments.
Depuis quelques années, plusieurs études relativisent cette affirmation, avec le poids croissant de médicaments internationalisés, dont les conditions de prescription sont voisines (référentiels internationaux de bon usage).
La Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) a analysé l’évolution des huit principales classes pharmaco-thérapeutiques entre 2006 et 2009 en unités standardisées. Elle démontre qu’en 2009, la consommation d’unités par habitant est de 456 au Royaume-Uni, 382 en Espagne et en France, 329 en Allemagne et 298 en Italie.
Pour trois classes (statines, IPP, antidépresseurs), la croissance française est la plus faible d’Europe.
Ces résultats sont confortés par une étude du LIR(18), en partenariat avec la chaire Essec santé et le professeur Gérard de Pouvourville, publiée en 2012, et dont la dernière mise à jour date de 2014. Elle compare la consommation de médicaments en volume, entre 2000 et 2013, dans les huit principales classes thérapeutiques, en France et dans six autres pays européens, et confirme que, en matière de consommation de médicaments, la France affiche le taux d’évolution le plus faible et une modération relative.
Si la France était bien, en 2000, le pays le plus consommateur en volume de médicaments de ces huit classes, elle se situe treize ans plus tard dans la moyenne européenne. Sur la période 2000-2013, dans cinq cas sur huit, le taux d’évolution est le plus faible dans l’Hexagone (antidépresseurs, antiulcéreux, hypolipémiants, antihypertenseurs et antibiotiques). Le seul cas où la consommation a évolué plus rapidement que dans les autres pays est celui des antiasthmatiques.
Enfin, une étude menée en 2019 par IQVIA pour le Leem a montré qu’entre 2004 et 2019, la consommation de médicaments par habitant a baissé de 16 % en France, alors qu’elle augmentait de 27 % en Allemagne. La France est d’ailleurs le seul pays européen dont la consommation médicamenteuse a diminué — et dans une proportion considérable — depuis 2004.
L’étude IQVIA révèle que l’écart avec les autres pays s’est fortement réduit : la consommation française n’est plus que de 7 % supérieure à la consommation britannique en 2019, alors que l’écart était de 35 % en 2004.
On observe par ailleurs une stabilité de la consommation en Espagne et une hausse en Italie (12 %). Le Royaume-Uni a, quant à lui, connu une hausse de 6 % entre 2004 et 2014, compensée par une baisse de 6 % entre 2014 et 2019.
L’essentiel
4 991 euros
Montant moyen de la rémunération sur objectifs de santé publique perçu
par les médecins libéraux en 2020.
447 euros
Consommation moyenne de médicaments par an
et par habitant en 2020.
80 %
Part de la Sécurité sociale dans le financement des dépenses
de santé en 2020.