Economie

Le marché pharmaceutique

15.02.24

Contexte économique

L’année 2022 marquée par une hausse durable de l’inflation

« La résurgence d’une hausse durable et généralisée du niveau des prix aura été le point le plus marquant de l’année [2022] sur le plan économique », selon l’institut Rexecode.
Cette inflation persistante a entraîné une restriction des politiques monétaires avec une hausse des taux directeurs et la réduction des politiques non conventionnelles.

Les déséquilibres économiques liés à la pandémie et accentués par les relances de 2021, ainsi que le conflit en Ukraine, ont contribué à cette évolution, bien que le choc sur les prix des matières premières ait été temporaire.
Les effets récessifs de l’inflation ont touché le pouvoir d’achat des agents économiques dont les revenus ne sont pas indexés sur l’inflation, notamment les entreprises à faible pouvoir de tarification et les salariés.
Ces effets relèvent également des déséquilibres globaux, avec des économies à haut revenu et faible taux d’épargne, comme celles de la zone euro, qui ont subi une diminution du pouvoir d’achat au profit d’économies à faible capacité d’absorption et aux forts taux d’épargne, dont la demande était contrainte.
Les restrictions de mobilité en Chine liées aux risques pandémiques ont également eu un impact sur l’activité économique. En somme, la phase de rebond post-Covid a cédé la place à une croissance affaiblie.

Un ralentissement de l’économie mondiale en 2023

A l’échelle mondiale, on note un ralentissement économique dont les effets, notamment sur l’inflation et la baisse des taux directeurs, sont différents selon les pays.
Alors que la Chine espérait une reprise économique fondée sur la croissance par la consommation, celle-ci n’est pas observée. D’après Rexecode, le pari d’un atterrissage en douceur de l’économie américaine reste crédible, mais exigera un fort interventionnisme budgétaire, notamment en matière de tissu industriel.
La zone euro est confrontée à un ralentissement marqué par une stagflation, qui soulève des préoccupations renouvelées concernant la compétitivité et la viabilité des finances publiques.


Une envolée spectaculaire du prix des matières premières

En 2022, le coût de l’énergie a explosé, exerçant une forte pression sur les entreprises. Le prix annuel moyen du MWh d’électricité a augmenté de 45 %, tandis que celui du MWh de gaz a enregistré une hausse de 107 % par rapport à 2021 d’après l’Insee. Après une période de baisse à la fin de 2022 et au début de 2023, les prix du pétrole et du gaz ont repris leur tendance à la hausse au début du second semestre 2023. Les matières premières non énergétiques ont également connu un recul, avec des évolutions variables, notamment parmi les matières premières alimentaires.
Malgré ces fluctuations, la plupart des prix demeurent supérieurs à ceux d’avant la crise sanitaire.

 

Le marché pharmaceutique mondial

Le médicament : un marché dynamique marqué par de fortes disparités

Le marché pharmaceutique mondial a atteint les 1 482 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2022 (environ 1 353 Mds€) et retrouve ainsi sa dynamique d’avant la crise de la Covid-19, avec une croissance de 2,2 % par rapport à 2021. Selon les estimations d’IQVIA, le marché mondial du médicament devrait, à terme, dépasser les prévisions prépandémiques et atteindre 1 900 milliards de dollars d’ici 2027 (environ 1 735 Mds€).
Cette croissance cache néanmoins de fortes disparités selon les zones géographiques.
En 2022, dix marchés ont concentré 72,1 % du chiffre d’affaires du marché pharmaceutique mondial.

 

 

La France est aujourd’hui le 5e marché mondial, avec 2,8 % des parts de marché en valeur, loin derrière les Etats-Unis, qui conservent leur position dominante avec 42,6 % des ventes mondiales. La Chine, en tant que deuxième marché mondial, représente 7,6 % des parts de marché, devançant le Japon (4,5 %). En Europe, l’Allemagne demeure en tête avec 4 % des ventes mondiales, suivie par la France (2,8 %), l’Italie (2,4 %), le  Royaume-Uni (2,3 %) et l’Espagne (1,9 %).
Enfin, la présence du Brésil, avec 1,9 % des parts de marché mondiales, témoigne du potentiel de croissance de certains pays émergents.

En effet, IQVIA prévoit une forte croissance d’ici 2027 sur les marchés composés principalement de pays émergents.
La croissance d’un marché repose sur deux leviers : la croissance en volume, du fait d’une augmentation du nombre de boîtes de médicaments vendues, et la croissance en valeur, qui correspond à une évolution du prix moyen des médicaments vendus. Ce prix moyen est notamment tiré à la hausse par l’arrivée de médicaments innovants, et à la baisse par l’augmentation de la concurrence sur les marchés plus anciens.
Les marchés occidentaux, englobant l’Europe de l’Ouest et l’Amérique du Nord, se caractérisent par un accès de longue date de la population à des systèmes de santé bien établis ainsi qu’aux médicaments. La population étant largement « couverte », ces marchés ne peuvent plus croître en volume. Leur croissance repose donc sur l’augmentation de la valeur des médicaments commercialisés, principalement due à l’introduction d’innovations plus coûteuses.
Néanmoins, étant donné que ces pays disposent déjà d’un accès à des technologies de santé onéreuses, la marge de croissance en valeur demeure modérée.

En revanche, dans les pays d’Europe de l’Est, où les systèmes de santé se sont progressivement développés depuis les années 1980, la population a déjà accès aux médicaments mais les thérapies ultramodernes, donc coûteuses, sont moins accessibles. Ainsi, ce marché devrait principalement croître en valeur avec l’introduction de médicaments plus onéreux.
Les marchés émergents aspirent à développer leurs systèmes de santé et à permettre l’accès aux médicaments à une population plus étendue. Ces pays ont également un accès accru à des médicaments plus coûteux qu’auparavant. C’est pourquoi ils devraient connaître une forte croissance d’ici 2027, tant en valeur qu’en volume.
 


Les aires thérapeutiques dans lesquelles les dépenses devraient être les plus les plus élevées en 2027 sont l’oncologie, l’immunologie et les antidiabétiques, suivies par les traitements pour les maladies cardiovasculaires.
L’arrivée continue d’innovations en oncologie devrait notamment induire une croissance de cette aire thérapeutique de l’ordre de 13 à 16 % d’ici 2027. En immunologie, la croissance devrait être freinée par la pénétration de médicaments biosimilaires sur le marché. Enfin, le diabète devrait devenir le troisième plus grand domaine thérapeutique au niveau mondial, avec une croissance estimée entre 3 et 6 % au cours des cinq prochaines années, du fait d’une explosion du nombre de patients diabétiques dans le monde.
Multiplié par quatre en trente ans selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre de diabétiques devrait ainsi drastiquement augmenter d’ici 2050 pour toucher 1,3 milliard de personnes (contre 529 millions en 2021 selon une étude publiée par The Lancet en juin 2023).
Les traitements de l’obésité devraient également connaître une forte croissance, de l’ordre de 35 à 38 %, portée par l’arrivée sur le marché de nouveaux médicaments.

 

Le médicament : un secteur en perpétuel mouvement, entre arrivées d’innovations et pertes de brevets

La demande constante pour les vaccins contre la Covid-19 a maintenu Pfizer à la place de premier fabricant mondial de médicaments en 2022.
Comirnaty, développé avec BioNTech, est resté le médicament le plus vendu pour la deuxième année consécutive, dépassant les 40 milliards de dollars de ventes.
Cependant, la baisse prévue de la demande fait planer des doutes sur sa performance future.
Le vaccin pandémique Spikevax de Moderna est le deuxième médicament le plus vendu mais devrait également voir ses ventes décliner avec la sortie de la pandémie. Merck & Co. a grimpé à la cinquième place grâce à Keytruda. Revlimid et Humira ont connu des déclins dus à la concurrence générique et biosimilaire, respectivement.
Dans le classement des entreprises, AstraZeneca a dépassé GSK en 2022 grâce à l’acquisition d’Alexion. Alors que certaines entreprises pourraient voir la fin des bénéfices liés à la pandémie en 2022, celles axées sur le diabète et l’obésité devraient prendre le relais.

 

Les fusions-acquisitions, un outil de croissance pour les entreprises biopharmaceutiques

L’industrie du médicament est peu concentrée, les cinq premiers groupes ne représentant que 20 % du marché mondial en 2022.
Les dix plus importantes transactions de fusion et acquisition dans le domaine de la biopharmacie en 2022 se sont élevées à environ 65 milliards de dollars d’après le classement établi par Fierce Pharma. Le média précise également que si 2022 a été plus fructueuse que 2021 (53 milliards de dollars), c’est une baisse par rapport aux années précédentes. En effet, les dix plus grosses fusions-acquisitions avaient représenté 97 milliards de dollars en 2020, l’apogée étant en 2019 avec un top 10 des transactions approchant les 200 milliards de dollars, boosté par le rachat de Celgene par Bristol-Myers Squibb.

Ces acquisitions s’inscrivent dans la stratégie des laboratoires consistant à enrichir leur pipeline de R&D en rachetant de plus petites structures à fort potentiel d’innovation.
Ainsi, grâce à ces rapprochements (implantation géographique stratégique des entreprises, regroupement des entreprises par domaine d’intérêt thérapeutique…), les grands groupes mondiaux espèrent atteindre une taille critique afin de réaliser des économies d’échelle (réduction des coûts de recherche), de renforcer leur présence sur les marchés et de faire face aux diverses pressions exercées sur les prix des médicaments.
D’autres objectifs stratégiques peuvent également être recherchés dans une telle transaction : l’acquisition de nouvelles technologies (achat de firmes de biotechnologies), l’introduction dans un nouveau domaine thérapeutique ou sur un nouveau segment (l’automédication, par exemple), l’acquisition d’une force de vente ou de distribution, l’implantation dans un pays étranger ou sur un continent.
Le coût des opérations d’acquisition étant élevé, les entreprises développent également des accords ou des alliances entre elles, et font appel à des compétences extérieures (sous-traitance) à tous les niveaux : recherche, développement, fabrication…
En outre, le partenariat peut prendre la forme d’accords de licence pour confier la commercialisation de certains médicaments à d’autres entreprises, en totalité ou dans des zones géographiques définies. La recherche fait également appel à de nouveaux modes de collaboration en réseau, entre recherche publique et recherche privée, par exemple, ou via des partenariats internationaux.

 

L’essentiel à l'international

1482 milliards de dollars

Chiffre d'affaires du marché mondial du médicament en 2022, dont 42,6 % est réalisé aux Etats-Unis.

5

Les 5ers groupes pharmaceutiques représentent 20% du marché mondial en 2022.

33,8 milliards d'euros

Montant des exportations de médicaments depuis la France en 2022.

5,9 milliards d'euros

Excédent commercial généré par les échanges de médicaments en 2022.

La Belgique

1er pays importateur de médicaments en provenance de France.

4ème

Le secteur du médicament, 4e excédent commercial de la France en 2022.